Tisser des liens
Date de publication
4 août 2025
Temps de lecture
4 minutes
Thématique
Billet d’humeur
Ça fait trois ans que je suis à mon compte, et j’ai eu la chance de travailler sur plein de projets différents. Mais j’ai aussi eu la sensation de m’éparpiller, de manquer de cohérence, de ne pas trop savoir où j’allais. Alors dernièrement, je me suis accordée le temps de mettre les choses à plat, pour ranger un peu ma tête et clarifier mes envies. J’ai pris la décision de faire ce travail dans le cadre d’un accompagnement guidé (coucou Les Mains !). Parce que l’idée derrière tout ça, c’est de structurer mon activité. Et je dois dire que ça m’a bien aidé. Ça m’a permis de tisser des liens là où je n’en voyais pas du tout, et de comprendre que finalement, mon parcours n’était pas si chaotique que ça.
Chaotique vous dites ?
Voyons, parce où commencer… Il y a dix ans, j’obtiens mon Master II en Droit Public Fondamental, et je décide de poursuivre en thèse. J’ai la chance d’obtenir une bourse. Alors passer mon temps à faire des recherches, être payée pour ça, et enseigner ? Go ! Je prends. Et je ne le regrette pas ! C’était une super aventure tant humaine qu’intellectuelle, bien que semée d’embûches – mais ça, c’est un autre sujet.

6 ans plus tard : j’ai seulement rédigé deux chapitres un peu bancals pour ma thèse, je vois la fin de mes droits au chômage approcher à grands pas, je travaille dans une grande solitude à cause du Covid et des confinements successifs, et je rumine quelques déconvenues avec l’Université. Bref, ça va pas fort, et je décide d’arrêter là. Je prends quelques mois pour réfléchir à ce que j’ai envie de faire.

J’ai très envie d’écrire, sur pleins de sujets différents – tout sauf du droit d’ailleurs, à l’époque. Je rencontre une rédactrice web freelance qui me parle de son parcours et de son métier. Je suis conquise : je me lance dans une nouvelle formation et je crée mon statut d’auto-entrepreneur.
J’ai très envie de dessiner aussi. J’ai repris mon crayon pendant ma thèse, et j’ai envie de laisser plus de place à la créativité. Alors je prends des cours du soir en école d’illustration, et petit à petit j’ouvre ma boutique en ligne.
Les trois années qui suivent, je prends tous les projets qu’on me propose. Je rédige des fiches-produits, des pages « à propos » et des manifestes de marque, je créé des sites web pour des personnes hypers différentes (un apiculteur, une tireuse de cartes, des avocats et avocates…), j’écris pour la revue l’Éléphant, je dessine pour les réseaux sociaux de ma cousine prof’ de yoga, je conçois mes premières collections de papeterie, et je survie à mes premiers marchés de la création.

Et voilà où j’en suis : des tas d’expériences qui vont un peu dans tous les sens, et une grosse interrogation. Mes choix me mènent-ils quelque part ?
Trouver un sens
Aujourd’hui je me rends compte que ma trajectoire n’est pas si aléatoire que ça. Il y a des sujets récurrents, des valeurs qui transpirent, des rencontres qui font sens…. Plus je réfléchis, plus je tisse des liens entre ces différentes expériences qui laissent apparaître des lignes de force. Et tout particulièrement une qui m’est apparue tout récemment.
J’ai travaillé cette année avec le réseau Jurislogement sur la conception d’une revue : la Revue Juridique du Droit au Logement (RJDL). Jurislogement, c’est un espace de rencontre entre juristes de tous horizons (du monde associatif, de l’avocature, de l’Université) qui travaillent dans le domaine de l’habitat. Son objectif est de permettre l’échange, la transmission des savoirs et des pratiques, et de développer des argumentaires juridiques dans le but de promouvoir l’effectivité du droit au logement. De cet espace est née l’idée de créer une revue pour capitaliser les recherches sur le sujet, faire intervenir des acteurs et actrices de terrain, et inciter les universitaires à partager leur point de vue.

Vous me voyez venir : retour à mes études de droit, et la boucle est bouclée. Mais en fait, je me suis rendue compte que ça allait un peu plus loin que ça. La thématique du droit au logement, c’est une vieille histoire d’amour pour moi. Elle m’a passionnée pendant mes études et m’a donné envie de me lancer en thèse. D’ailleurs, au départ, je voulais poursuivre des recherches dessus. Mais n’ayant pas trouvé d’angle pertinent à traiter, je me suis intéressée au droit de propriété – qui permet d’ailleurs d’y revenir, quand on s’intéresse à la question des expropriations, des expulsions locatives ou encore de l’encadrement des loyers. Vous l’aurez compris, c’est un sujet qui me tient de longue date. Je suis donc très heureuse et fière d’avoir participé à ce beau projet de revue !
Chez soi : un fil conducteur
Et puis je me suis questionnée : pourquoi le droit au logement ? Il y a un tas d’autres sujets passionnants dans le vaste domaine des droits humains : liberté d’expression, liberté d’aller et venir, droit à la vie privée…
Alors ça a fait « tilt » ! Un lien s’est clairement dessiné entre mes expériences : un fil solide qui a résisté sans sourcillé aux aléas de ses dernières années, et qui est solidement enraciné en moi. Ce fil, c’est la conviction profonde qu’il faut être bien chez soi pour s’épanouir, qu’avoir un chez soi est indispensable au fait de pouvoir vivre de manière digne, que soigner son chez soi participe au bien-être mental, mais aussi physique.
Mon chez moi est un pilier auquel j’accorde une très grande importance. Cela explique d’ailleurs certains choix de vie : je suis profondément sédentaire, je déteste déménager, et je me suis toujours débrouillée pour avoir la possibilité de travailler à domicile. Je mets beaucoup d’énergie à créer un cocon confortable dans lequel je me sente bien. D’ailleurs, je vous en ai déjà un peu parlé dans mon billet d’humeur de début d’année sur la réorganisation de mon espace de travail.

Et puis chez soi ne représente pas seulement la sphère intime : c’est aussi un espace politique. C’est le lieu des inégalités sociales, puisque tout le monde n’a pas la chance d’habiter un logement décent – c’est le sujet du premier numéro de la RJDL d’ailleurs : L’Habitat Indigne. C’est le lieu des inégalités de genre et des violences intra-familiales. C’est aussi le lieu de la paresse, du repos, du repli face à l’injonction au travail et à la performance. Enfin, c’est le lieu de nos réflexions sur l’écologie : ce qu’on consomme, ce qu’on jette, ce qu’on gaspille, ce qu’on fait de nos jardins (quand on peut en avoir un) pour accueillir la biodiversité et apprendre à vivre avec le vivant.

Bref, l’espace domestique cristallise un tas de sujets qui me passionnent depuis longtemps. Un fil puissant qui me donne envie de tricoter tout un tas de nouveaux projets pour donner un sens à mon activité. Et vous qui m’avez lu jusque-là, dites-moi ce que vous en pensez ! Est-ce que ce sont des sujets qui vous intéressent ? Et qu’est-ce que ça veut dire pour vous, se sentir chez soi ? Laissez-moi vos avis en commentaire, j’ai hâte de vous lire !
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